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Chroniques
Gioachino Rossini
Tancredi | Tancrède
Chevalier Croisé d'origine normande, Tancrède est immortalisé par le poème épique du Tasse (La Jérusalem délivrée, 1575), puis par la tragédie de Voltaire (Tancrède, 1760) avant d'inspirer Gioachino Rossini. Après avoir servi la comédie burlesque en un acte (La Cambiale di matrimonio, L'Equivoco stravagante, La Scala di seta, etc.), le compositeur entre dans le monde de l'opéra héroïque avec Ciro in Babilonia (1912).
Second tentative et commande de La Fenice, Tancredi doit son livret à Gaetano Rossi, un auteur attaché à cette maison qui utilise le matériau historique comme toile de fond pour une intrigue relativement conventionnelle mêlant envolées patriotiques, chassé-croisé amoureux et secret impossible à révéler dans Syracuse alors sous règne arabe, en 1005. Le succès est au rendez-vous des premières représentations de la création des 6 février (interrompue pour indisposition des deux primadone) et 11 février 1813. La reprise de l'ouvrage à Ferrare, le mois suivant, voit l'heureux dénouement remanié au profit d'une mort héroïque sur le champ de bataille.
Cette nouvelle version, la plus fréquente, est celle adoptée pour le Festival Rossini de Pesaro, enregistrée ici au Teatro Communale de Florence, le 21 octobre 2005. Pier Luigi Pizzi accorde beaucoup de place à l'architecture, aux effets géométriques et visuels, plus qu'à la mise en scène proprement dite. Les couleurs franches des costumes (noir, blanc et rouge) participent de la vision d'un melodramma eroico où l'amour ne peut s'exprimer. Quant à elle, la direction gracieuse et élégante de Riccardo Frizza met en valeur le travail d'un créateur d'à peine vingt ans, repu de Beethoven, Mozart et Händel.
Habituée du rôle-titre, le mezzo Daniela Barcellona ravit par un timbre riche, des attaques d'une grande douceur et une vraie conduite de la nuance. Elle forme un couple équilibré avec Darina Takova (Amenaïde), colorature au timbre velouté, agile et efficace – sauf pour des graves peu sonores, défaut que ne partage pas Barbara Di Castri (Isaura). Côté masculin, leurs partenaires ne déméritent pas. Raúl Giménez (Argirio) possède un timbre clair, des vocalises précises et un chant bien conduit. On apprécie Marco Spotti (Orbazzano) pour sa belle couleur. Bien faible par son allant et ses approximations, le Coro del Maggio Musicale Fiorentino est l'unique déception de cette production.
SM